Par Helwan Felappi

11 Novembre 2018, commémoration de l’armistice de 1918. Parmi les graves et majestueuses cérémonies d’hommage aux millions de morts de ce conflit meurtrier, le président Macron, encore une fois, a les yeux du monde entier rivés sur lui. Son discours solennel sur les Champs-Élysées est applaudi par les médias étrangers. L’entente affichée avec la chancelière Allemande Angela Merkel, un siècle après la Grande Guerre, met un point d’honneur à l’amitié Franco-Allemande qu’il appelle à renforcer. Bref, un succès diplomatique et d’image, comme il y en a eu de nombreux autres lors de ces deux premières années à la tête du pays.

© Ludovic Marin/Pool via REUTERS

Dès son arrivée au pouvoir en mai 2017, Emmanuel Macron avait multiplié les coups d’éclats sur la scène internationale. Les coups de com’ se suivirent, de son “make our planet great again” qui s’opposait directement à la politique menée par le président Trump, jusqu’à sa célèbre, et énergique, poignée de main avec ce dernier. Dès le début, Macron a affiché sa volonté d’incarner, et de défendre, les valeurs libérales et européennes. “The Economist”, porte-étendard du libéralisme, nomme d’ailleurs la France “pays de l’année” 2017.

Mais derrière cette image reluisante, la diplomatie d’Emmanuel Macron a t-elle atteint les objectifs qu’elle s’était posée ?

Il est vrai que, initialement du moins, Macron a su projeter une impression nettement plus moderne et dynamique que son prédécesseur François Hollande. Il saisit de nombreuses occasions pour placer la France au centre de la diplomatie mondiale, que ce soit avec des mots ou avec des actes. Au Moyen Orient, il désamorce la crise engendrée par la démission du premier ministre Libanais Hariri, et l’accueille à Paris, solidifiant les liens étroits entre les deux pays. La France intervient aussi aux côtés des États-Unis et du Royaume-Uni en menant des frappes contre Bachar Al Assad, après que ce dernier soit soupçonné d’avoir eu recours aux armes chimiques.

Au cours de ces deux dernières années, Emmanuel Macron a effectivement prit l’initiative sur de nombreux dossiers, essentiels et stratégiques pour la France. Au niveau européen, il montre clairement son souhait de voir une intégration plus poussée de l’Union européenne.  De même, il cultive sa ‘bromance’ avec le président Trump, dans l’espoir affiché de parvenir à sauver non seulement les accords sur le nucléaire iranien, mais aussi les relations commerciales entre l’Europe et les États-Unis. Hélas, derrière ces proclamations, peu d’avancées concrètes ont été réalisées. Cette dissonance entre l’image que Macron souhaite donner et ce qu’il parvient à faire en réalité est parfaitement illustrée par sa visite à Washington, en avril dernier. Derrière la magnifique réception et l’entente affichée par les deux chefs d’État, se cache un revers majeur.

En effet, Macron n’est pas parvenu à convaincre le président américain de changer d’avis quant à son intention de se retirer des accords sur l’Iran. Guillaume Larrivé, membre du parti d’opposition Les Républicains, avait alors commenté que “Derrière les belles images symboliques de l’alliance, il y a une vraie panne stratégique: Emmanuel Macron n’a aucune influence sur Donald Trump”. Et il faut reconnaître qu’effectivement, le président français a échoué à faire changer d’avis à son homologue américains sur des dossiers tels que l’Iran, les échanges commerciaux ou encore le climat. Mais il est vrai aussi qu’aucun autre leader mondial, de Justin Trudeau à Angela Merkel, n’a eu plus de succès.

Au niveau Européen, même constat. Derrière les proclamations, sa politique se heurte au manque de volonté de ses partenaires. La chancelière allemande a maintes fois donné son support à une intégration plus forte, économiquement et politiquement, sans pour autant passer aux actes pour soutenir son collègue. De plus, la montée de gouvernements populistes peu enclins à ‘plus d’Europe’, tels que ceux italiens, hongrois ou bien polonais, ont aussi réduit la marge de manœuvre française.

© Julien de Rosa/EPA

Mais Macron n’y est pas pour rien. En effet, nombre de ses décisions n’ont certainement pas aidé à rendre son message crédible. Notamment, sa décision de ne pas accueillir les migrants de l’Aquarius dans le port de Marseille cet été, un geste décrit comme un manque de solidarité par les dirigeants Italiens.

Macron peut tout de même revendiquer quelques avancées concrètes, telle que le durcissement des directives sur les travailleurs détachés, un premier pas pour résoudre le problème des écarts de salaires entre les pays de l’Union. Mais cela ne reste qu’un petit pas, bien loin de l’Europe “souveraine, unie et démocratique” proclamée par le président lors d’un discours en septembre 2017.

Ce qui ressort, c’est que d’un côté, Macron est parvenu à rehausser le prestige et l’attractivité de la France à l’étranger et à la replacer dans un rôle diplomatique plus visible, aidé en cela par l’effacement relatif d’Angela Merkel, affaiblie domestiquement, l’isolationnisme de Trump et le Brexit qui embourbe le Royaume-Uni. Mais de l’autre côté, on constate aussi que le Président français a rarement su transformer l’essai en de véritables succès sur les dossier les plus stratégiques, tels que l’Iran, ou bien les Accords de Paris.

Et son aura et sa popularité à l’international semblent aussi s’amoindrir, son idylle avec Trump s’étant refroidie dernièrement. Sa marge de manœuvre à l’international est d’autant plus mise en péril par la contestation grandissante dont il fait l’objet en France, incarnée par le mouvement des gilets jaunes. Reste à voir si les mouvements sociaux continuent de prendre de l’ampleur. Le cas échéant, il pourra difficilement se concentrer sur les questions diplomatiques, d’autant plus que son prestige à l’international risque d’être négativement affecté si la situation dégénère dans la violence.

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