Par les associations politiques, La France Insoumise et Les Républicains

 

La France Insoumise : Antisionisme : La confusion comme arme liberticide

Antisémitisme, nom masculin : Doctrine ou attitude systématique de ceux qui sont hostiles aux juifs et proposent contre eux des mesures discriminatoires.

Antisionisme, nom masculin : Hostilité à l’existence ou à l’extension de l’État d’Israël.

Ce ne sont pas les mêmes termes, pourtant nous constatons dans le paysage politique français une confusion entre eux. L’antisémitisme ne fait l’objet d’aucun débat, mais est sujet à une condamnation pénale au même titre que toute discrimination et que tout racisme. L’antisionisme est une opinion politique qui n’implique rien d’autre que la condamnation de l’existence d’Israël, et non de l’existence des Juifs, de leur intégrité et de leur droit à pratiquer leur religion. On peut trouver cette idéologie dépassée par l’existence d’Israël, et alors le terme exact pour définir l’opposition à la politique israélienne actuelle, colonialiste et d’extrême-droite, serait l’anti-néo-sionisme. Le néo-sionisme se dresse en opposition au post-sionisme ; il s’agit des deux principaux courants politiques en Israël. Mais il paraît difficile d’intégrer l’antisionisme à la définition-même de l’antisémitisme. Pour aller plus loin, il est inacceptable et liberticide d’assimiler ces deux termes.

Au même titre que le conservatisme, le libéralisme ou encore le communisme, le sionisme est une pensée politique génératrice de débats devant se dérouler sereinement sans crainte d’un délit d’opinion, instauré insidieusement par le projet de loi de la majorité.

Comme nous le matraquent à longueur de journée les spots publicitaires du gouvernement : “en France, on aime le débat”. Il y a fort à parier que le débat en France se retrouverait grandement limité si cette loi entrait en vigueur, car des propos, des manifestations, voire des associations seraient réprimés et interdits en raison de la non-conformité de leurs opinions vis-à-vis de ceux du gouvernement.

L’un des arguments des tenants de cette proposition de loi est que l’antisionisme est parfois utilisé comme une “façade de l’antisémitisme”, selon les mots de Manuel Valls. Instrumentalisé par Dieudonné ou Alain Soral pour dissimuler leur antisémitisme flagrant et, ainsi, échapper à des condamnations, l’antisionisme ne doit pas devenir légalement ce que ces agitateurs ont tenté d’en faire. Ce serait leur concéder une grande victoire d’associer ces deux termes plutôt que de fournir l’effort intellectuel de les utiliser et d’apprendre à les utiliser selon leur définition (que vos serviteurs·euses vous ont fait l’honneur de rappeler plus haut).

Ainsi, au lieu d’instaurer un délit d’opinion, le premier depuis la guerre d’Algérie, il serait préférable de réaffirmer collectivement et politiquement la différence fondamentale entre ces deux termes pour garantir la liberté d’expression et le débat démocratique chers à notre République, tout en condamnant unanimement toutes les formes de discrimination raciste et sur la base de l’appartenance religieuse, dont l’antisémitisme fait évidemment partie.

 

Les Républicains : De l’antisémitisme à l’antisionisme, l’amalgame de trop ?

Les évènements récents relancent le débat controversé du parallèle fait par certains entre l’antisémitisme et l’antisionisme. L’occasion aussi de constater que l’appropriation de la question par le gouvernement et les médias n’a pas effacé les ambiguïtés autour du judaïsme et d’Israël. Cependant, si l’on veut espérer penser cet amalgame, il faut nécessairement connaître le sujet : « Nous ne céderons rien à l’antisionisme, car il est la forme réinventée de l’antisémitisme », proclamé par le président de la République Emmanuel Macron, ne relève pas dans ce cas précis d’une grande pertinence.

L’antisémitisme est le nom donné de nos jours à l’hostilité (grandissante) vis-à-vis du judaïsme et de la communauté juive. L’antisionisme, bien que le terme « Sion » soit associé à la religion juive, désigne historiquement un doute quant au projet d’établissement d’un foyer national juif en Palestine. De fait, l’amalgame est hasardeux comme le souligne Dominique Vidal dans son livre Antisionisme = antisémitisme ? Réponse à Emmanuel Macron. D’une part, car la haine antisémite est proprement religieuse, elle est implantée depuis longtemps dans les sociétés. D’autre part, car l’antisionisme est un rejet d’un projet fondamentalement politique et bien plus contemporain, cela est donc une erreur historique, un anachronisme qui serait bon d’éviter. Ce rapport entre antisémitisme et antisionisme tel que l’envisage la majorité à l’Assemblée nationale et le gouvernement est dangereux, car c’est permettre la légitimation de discours haineux qui n’ont pas lieu d’être et qui, plus que de sanctions, nécessite une véritable éducation.

Puis, il est aisé de voir dans cette prise de position le dessein d’un gouvernement qui par sa seule action tend à universaliser par force une vision qui lui est propre. Or, n’est-il pas nécessaire dans de telles circonstances de crise de faire preuve d’humilité et d’objectivité ? Faire le lien entre antisémitisme et antisionisme ne revient-il pas à taire les voix de ceux, juifs ou non, qui n’adhèrent pas à cette idée ? Ceci paraît bien similaire à ceux-là qui, par leur haine, cherchent à imposer leur idéologie. L’antisionisme reste aussi le positionnement de nombreux Juifs qui n’estiment pas que leur place soit en Israël.

Enfin, c’est commettre une faute politique que de soutenir l’initiative défendue par le gouvernement. Rendre officiellement l’antisionisme le synonyme de l’antisémitisme revient à soutenir qu’il y a incompatibilité entre Israël et la Palestine. C’est réfuter qu’il puisse un jour y avoir une réconciliation entre ces deux Etats et exacerber des différends qui ne mènent qu’à la haine de l’autre. Or, la devise française n’exprime-t-elle pas le contraire ? Il appartient à chacun de se construire son avis sur cette impasse politique et il appartient notamment à ces deux communautés d’en décider l’issue. Et bien que les attaques antisémites à l’origine de ce rapprochement eurent lieu sur le territoire français, il semble inévitable dans ce contexte de faire preuve de sagesse dans l’action politique. Ainsi, c’est de se croire au-dessus de l’Histoire que de vouloir rendre par la loi l’antisionisme l’égal de l’antisémitisme.

 

Cover photo: Antoni Lallican, Hans Lucas @AFP

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